jeudi 29 octobre 2015

Bartol et le jardin d'Eden

Titre: Alamut
Auteur: Vladimir Bartol
Date de parution: 1938

Renseignements:

Vladimir Bartol est né le 24 février 1903 à Trieste et meurt le 12 septembre 1967 à Ljubljana.
On sait peu de choses sur Vladimir Bartol. On sait qu'il a étudié à l'Université de Ljubljana et à la Sorbonne, qu'il a travaillé sur les théories de Freud et a traduit Nietzsche.

Mais plus important pour l'analyse de ce roman, Vladimir Bartol fut un résistant actif pendant la seconde guerre mondiale.La date de parution du livre devient alors révélatrice. 1938. Adolf Hitler est au pouvoir et le monde se trouve à la veille de son embrasement.

"Alamut" ne connut un certain renom qu'une quarantaine d'années après sa publication et Bartol, décédé en 1967, n'aura pas su le chemin qui allait être tracé par son livre.

Résumé:

Avani, petit-fils de Tahir qui mourut pour la cause de l'Ismaelisme, est envoyé par son père à la citadelle d'Alamut où commande Hassan Ibn Sabbâh. Cette forteresse est devenue un refuge pour les partisans d'Ali et un foyer d'opposition au calife de Bagdad, financée par le calife du Caire. Celui qu'on nomme dorénavant Ibn Tahir va alors rejoindre les fedayin, un groupe de combattant et d'érudit d'élite prêt à se sacrifier à la grandeur de leur cause.

Parallèlement, on retrouve la jeune Halima, vendue sur un marché oriental, emprisonnée dans une cage au sein d'une caravane qui traverse le désert. La belle Halima a peur de sa destinée lorsqu'elle est récupérée par un cavalier qui travaille pour celui qui l'a achetée. C'est alors qu'elle se retrouve dans des jardins magnifiques au milieu d'autres jeunes filles qui l'accueillent dans ce nouvel environnement.

Alors qu'Ibn Tahir découvre la joie de servir avec ferveur et qu'Halima découvre avec merveille sa nouvelle vie faite de leçons et de beauté, Hassan Ibn Sabbâh suit le plan qu'il a tracé depuis des années pour parvenir à ses fins


Extrait:

" - En fait, la force de toute organisation repose sur l'aveuglement de ses partisans. Les gens occupent des rangs différents, selon leur capacité à manipuler les idées. Celui qui veut les diriger doit respecter la diversité de leurs aptitudes. Autrefois, les foules exigeaient des miracles des prophètes et ils devaient en faire s'ils voulaient garder leur prestige. Plus la conscience est basse, plus le zèle est grand. C'est pourquoi je partage l'humanité en deux catégories fondamentalement différentes: une poignée de gens qui savent ce qu'il en est des réalités et l'énorme majorité qui ne sait pas. Les premiers savent que la vérité est inaccessible, les autres tendent la main vers elle. Que leur reste-t-il d'autre que de se gaver de contes et de légendes? Et qu'y a-t-il d'autre que le mensonge et la tromperie! Et cependant seule la compassion les pousse à se comporter ainsi. Donc, s'ils sont aveugles et que la supercherie est inévitable pour conduire les foules vers un but que nous voyons et qu'elles ne comprennent pas, pourquoi ne pourrait-on pas construire une organisation consciente à partir de cet aveuglement, de cette supercherie? "

Avis:

Ce livre, retraduit récemment par Andrée Lück Gay dans la collection Libretto, reconnaît un renouveau grâce à sa dénonciation des esprits endoctrinés par la manipulation d'élites qui n'hésitent pas à développer la rage de leurs fidèles sur des mythes et des promesses illusoires.

À l'origine, si l'auteur situe son histoire dans l'Orient du 10ème/11ème siècle et utilise la figure historique d'Hassan Ibn Sabbah, c'est pour mieux dénoncer les mythes hitlériens et la folie des partisans de l'état national-socialiste. Car de la vie d'Hassan Ibn Sabbâh, l'époque contemporaine n'en connaît plus grand chose à part les fables syriennes récupérées par Marco Polo lors de ses voyages.

Mais cela n'empêche pas l'universalité de l'histoire de Vladimir Bartol de toujours passionner le lecteur. Une universalité qui trouve un écho dans le monde d'aujourd'hui alors que l'état islamique attire vers lui des jeunes hommes et des jeunes filles que rien ne prédestinaient à devenir des meurtriers.

La lecture de ce livre a été un véritable plaisir, l'attention tendue par la révélation des différentes intrigues politiques.

Ce roman est constitué de deux parties.

Une première où on nous présente la face extérieure de l'écrin où se déroule notre intrigue, la Cité d'Alamut et ceux qui y vivent. Dans cette partie, Hassan Ibn Sabbah est présent mais seulement dans le discours et les pensées des résidents d'Alamut. Il reste pour le lecteur aussi mystérieux que pour les personnages.

Et une deuxième partie qui commence lorsque Hassa Ibn Sabbâh fait physiquement son apparition et où l'on va peu à peu apprendre son plan et la mise en oeuvre de celui-ci.

Je n'en dirai pas plus, et j'en ai déjà dit beaucoup, pour vous laisser le temps de vous précipiter chez votre libraire ou votre bibliothèque et le lire du début à la fin. Et n'hésitez pas quand ça sera fait à venir me dire ce que vous en avez pensé.

Laissez vous tenter...

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